Joueur en série: la saga Mario Bros | Pèse sur start
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Joueur en série: la saga Mario Bros

Super Mario Odyssey, le dernier épisode de la série phare de Nintendo, sort ce 27 octobre. Comme d’habitude, Nintendo joue gros: depuis 35 ans, c’est largement à ses jeux Mario que la firme japonaise doit sa réputation de Disney des jeux vidéo.

Retour sur une série de jeux qui a inventé le jeu de plates-formes.

Attention: Mario apparaît dans un nombre incalculable de jeux dérivés (jeux de golf, de course, de rôle, de casse-tête, il y en a plus de 150, sans compter les titres où il fait une simple apparition surprise). Alors on va se concentrer ici sur les jeux de plates-formes, un genre dans lequel les Mario ont posé toutes les règles et constituent encore et toujours les références absolues (il y en a bien eu quelques autres avant Mario, mais... qui se souvient de Space Panic?).

La première fois que l’on dirige le bedonnant moustachu, c’est en 1981, en arcade, dans le jeu Donkey Kong. Il aurait dû être Popeye et affronter Brutus, au lieu de Donkey Kong. Mais Nintendo n’obtient pas les droits de la franchise. Il est donc d’abord nommé Ossan pendant le développement du jeu, ce qui veut dire «homme d’âge moyen» en japonais.

Finalement, quand le jeu sort dans les salles, il est baptisé «jumpman», parce que principe du jeu consiste à sauter par dessus des tonneaux jetés par le gorille Donkey Kong. Le saut s’avère donc la fondation de la jouabilité dès les prémices de la série. La demoiselle en détresse n’est pas encore la princesse Peach, mais Pauline, du nom de l’épouse du responsable d’entrepôt de Nintendo of America Pauline James.

Mario n’a peut-être pas encore de vrai prénom, mais son aspect est déjà adopté. Pour des raisons techniques d’ailleurs: la moustache et la casquette évitent d’avoir à dessiner une bouche et des cheveux trop détaillés. Au final, Nintendo récolte un gros succès au Japon et en Amérique du Nord: le petit bonhomme moustachu est sur la map!

Il est ensuite le méchant dans Donkey Kong Jr en 1982 et le héros dans Mario Bros (qui introduit les tortues koopa en guise d’ennemi) en 1983, deux autres jeux d’arcade. Nintendo lui donne alors son identité: il est italien, vit à Brooklyn, a un frère Luigi et est désormais plombier (il était charpentier dans Donkey Kong).

Et il s’appelle Mario donc. Pourquoi? Parce que c’est le prénom du propriétaire des locaux de Nintendo of America. En 1981, Nintendo a un retard sur le loyer. Mario Segale se fâche, vient réclamer son chèque, et les têtes pensantes de Nintendo se disent «tiens, voilà un prénom intéressant». Belle technique de distraction... Mais avouez que ça aurait été encore plus drôle s’ils s’étaient inspirés de son nom de famille pour en tirer le nom «Sega».

Photo: Wikimedia Commons

1985 est l’année de la révélation. Le premier Super Mario Bros débarque sur la toute fraîche console NES de Nintendo, et c’est un chef d’œuvre. Le créateur du jeu, Shigeru Miyamoto, jette tout simplement les bases du jeu de plates-formes (ou «athletic games» comme les appelle Miyamoto à l’époque) pour les années à venir.

Il faut traverser de gauche à droite des niveaux en 2D truffés de trous, tuyaux et ennemis à éviter ou éliminer. Un bouton sert à courir et l’autre à sauter (alors qu’au départ Miyamoto voulait qu’on appuie sur la flèche du haut). On peut récolter un champignon pour grossir et survivre au premier contact ennemi, une fleur pour balancer des boules de feu, une étoile pour devenir invincible quelques secondes.

Tout est déjà là ou presque, y compris la princesse Peach, demoiselle en détresse officielle de la série. Mario part la sauver des griffes de l’affreux Bowser, une grosse tortue démoniaque. 30 ans plus tard, le prétexte scénaristique est toujours le même...

Le succès est tout simplement colossal: il s’est vendu en tout plus de 40 millions d’exemplaires de Mario Bros, ce qui en fait le 6e jeu le plus vendu de tous les temps! Oui, devant n’importe quel Call of Duty [rire démoniaque!].

Super Mario Land (1989), un des jeux phares de LA Game Boy, lui ressemblera beaucoup au niveau du gameplay, bien que plus court et dans un univers assez différent. On y sauve cette fois-ci la princesse Daisy, qui s’avère être la blonde de Luigi. Gros succès, le jeu connaîtra une suite sur même console portable en 1992, Super Mario Land 2, où apparaît pour la première fois Wario, le double maléfique de Mario.

La vraie suite de Super Mario Bros, Super Mario Bros 2, ne sort qu’au Japon, en 1986. Il s’agit, en gros, d’un Super Mario Bros 1 assaisonné aux piments bananes: un challenge ultra relevé. Mais cette suite ne sort qu’au Japon (nous devrons attendre sept ans et une compilation sur Super Nintendo, Super Mario All Stars, pour pouvoir jouer à ce titre, rebaptisé Super Mario Bros: The Lost Levels).

Car chez Nintendo, on se dit que les pauvres enfants américains aux doigts potelés seraient incapables de relever le défi. Alors on préfère nous servir l’adaptation d’un jeu destiné aux enfants japonais, Yume Kōjō: Doki Doki Panic. Nintendo change simplement quelques musiques et place Mario et sa clique en remplacement des personnages tirés d’une émission télé pour les petits. Oui, c’est humiliant. C’est notre Super Mario Bros 2 à nous.

Malgré son goût très différent, ce jeu n’en est pas moins développé par Nintendo et lui aussi très bon. Son originalité: on peut diriger au choix Mario, Luigi, Toad ou la princesse Peach, chacun avec des forces et faiblesses. Autre évolution par rapport au premier: les niveaux partent dans toutes les directions, et on peut revenir en arrière si on veut. Pas mal, pour 1988.

Cette année-là, Super Mario Bros 3 débarque au Japon (nous l’aurons deux ans plus tard, ce qui fait un peu long comme décalage horaire). C’est un Mario Bros XL: chaque monde est représenté par une carte où l’on choisit son chemin et les niveaux que l’on veut emprunter, quitte par exemple à faire un détour pour accéder à un mini-jeu qui rapporte un bonus. C’une première dans la série).

Côté jouabilité, Mario peut enfiler des costumes pour obtenir des compétences spéciales, nager et glisser sur des pentes. Y compris, il faut le dire, sur celle de la dépendance. En effet, après les champignons, le voilà qu’il consomme des feuilles, ce qui lui permet de se déguiser en raton laveur pour planer et s’envoler dans les airs. D’une logique implacable.

Remarquez, dans Super Mario World, le 4e opus, Mario utilise bien des plumes. Mieux vaut ne pas savoir où il les met, mais au final, il en tire une cape qui lui permet de voler là aussi.

Cet épisode vendu avec la Super Nintendo en 1991 chez nous est un aboutissement du concept Mario Bros. Il est bien plus beau du fait de la technologie 16 bits de la console. Il offre 99 niveaux pleins à craquer de défis, de secrets et de bonus. Il introduit Yoshi, le petit dinosaure que Mario peut chevaucher pour avaler ses ennemis. Il propose des sorties de niveau alternatives qui ouvrent de nouveaux chemins sur la carte du monde. Et les contrôles sont irréprochables. Franchement, trouvez le moyen de jouer à ce jeu là, maintenant: il est toujours aussi bon!

À noter que Yoshi’s Island est officiellement la suite de Super Mario World. Mais son univers est si différent qu’il est peu connu ainsi. Il faut dire qu’on y dirige cette fois-ci Yoshi, qui porte bébé Mario sur son dos. Les niveaux sont parfois ardus, mais la qualité est à nouveau au rendez-vous. Et le style graphique est adorable, comme si le jeu avait été directement dessiné au crayon de couleur.

En 1996, alors que Sony démocratise les jeux en 3D avec sa PlayStation, Nintendo va à nouveau mettre tout le monde d’accord avec Super Mario 64, sur la nouvelle console Nintendo 64. Le jeu devient la nouvelle référence des jeux de plates-formes en 3D et sera le mètre étalon de ses concurrents (et de ses suites). L’exploitation impeccable de la 3D, le contrôle au stick, la variété des mondes: le jeu est acclamé comme une véritable «révolution». Sans parler d’un détail gravé dans le cerveau des joueurs et joueuses: Mario a désormais une voix, SA voix, celle de Charles Martinet («it’s meeeeee, Maaario!!!»).

Ce sera le seul jeu de plates-formes Mario de la Nintendo 64, une console au succès commercial mitigé. Il faut attendre 2002 pour un nouvel épisode, Super Mario Sunshine sur GameCube. La qualité est là, mais depuis Mario 64, tout le monde s’est habitué à la révolution en 3D. Alors l’épisode semble moins novateur, et au final ne marque pas vraiment les esprits. Là encore, Nintendo n’insistera pas et attendra la Wii pour relancer sa série phare.

En attendant, la compagnie japonaise se fait conservateur en sortant New Super Mario Bros sur Nintendo DS (2006). C’est un «reboot» (les mauvaises langues diront un «remake») du premier Mario sur NES. On y retrouve le principe du jeu en 2D à défilement horizontal, les tortues, certains sons sont pratiquement identiques à ceux d’il y a 20 ans... Et bien sûr, il y a des tuyaux. Miyamoto est obsédé par les tuyaux. Il en voyait dans tous les mangas qu’il lisait dans sa jeunesse: il remarquait qu’il y avait toujours une décharge avec des tuyaux. C’est ce qui l’a inspiré. Très bien accueilli par les fans de Nintendo toujours prêts à fondre pour leur plombier préféré, les New Super Mario Bros auront droit à des suites sur Wii, 3DS et WiiU.

C’est en 2007 que sortira un «véritable» nouvel opus, sur Wii: Super Mario Galaxy. Le concept de cet épisode est de proposer des niveaux en forme de planète, sphériques donc, et de jouer avec la gravité pour proposer de nouveaux défis. Même s’il est un peu trop facile aux yeux des vétérans de Mario, on sent à nouveau un jeu bien pensé et peaufiné jusqu’au moindre détail. C’est d’ailleurs la marque de fabrique de Nintendo, qui recycle énormément ses grosses franchises, mais dont chaque jeu est maîtrisé de bout en bout.

Comme la Wii se vend bien mieux que la Nintendo 64 et le GameCube, la compagnie de Kyoto gratifie les fans trois ans plus tard d’un Super Mario Galaxy 2 sur cette console. Un peu plus dur, le jeu est à nouveau impeccablement pensé et acclamé, mais n’évite pas un sentiment de déjà-vu par rapport à son prédécesseur.

Après un Super Mario 3D Land efficace, mais en manque d’inspiration sur 3DS en 2011, Nintendo met à nouveau un bon gros plat de résistance sur la table, histoire de faire honneur à sa nouvelle console: Super Mario 3D World, sur WiiU en 2013. Les développeurs semblent enfin avoir de nouvelles idées, et donnent tout ce qu’ils ont pour varier le gameplay: courses contre la montre, niveaux de style Mario kart, phases de «shoot-them-up», des gros «bosses», de la compétition en multi, des personnages différents... Pas un niveau ne ressemble à l’autre.

Nintendo pense aussi aux joueurs qui ont d’autres idées en leur fournissant deux ans plus tard un jeu-outil: Super Mario Maker (toujours sur WiiU, puis sur 3DS), qui leur permet de développer leurs propres niveaux. Il faut dire que les écrans tactiles des deux consoles sont tout idéaux pour placer des obstacles où on veut dans ses propres créations.

Si vous êtes toujours là après ces 2000 mots, avant tout félicitation, vous avez mérité un champignon. Ensuite, vous pouvez constater qu’aucun jeu majeur de la série des Mario n’est raté. Les pires ont un goût de réchauffé, la plupart des autres sont des grands classiques. On espère que le Super Mario Odyssey sorti aujourd’hui sur Switch est à ranger dans la deuxième catégorie!

 

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